L’archipel des hauts de Conthey

L’identité et l’espace public de la ruralité comme clef pour un projet de revitalisation

JMA-GE TRAVAIL DE MASTER SP 2023

Prix SIA Genève
Nominé Masterpreis SIA

Comment puiser dans l’identité du lieu pour créer des espaces de qualité ?
Cette problématique m’a été amenée par plusieurs pistes. Tout d’abord, par apport au lieu, j’ai remarqué que les nouvelles constructions sont en contradiction avec la ruralité et ne proposent pas d’espace public de qualité. Les villages se sont fortement étalés durant les 30 dernières années, principalement avec des zones villas.
Ensuite, les commerces, les bars et les établissements publics ont tendance à disparaître des villages au profit de la plaine. Les vergers ont également totalement disparu des villages. La disparition de ces éléments et les nouvelles constructions en dehors des villages nuisent à l’identité du lieu.
Cependant, cette problématique ne découle pas uniquement du lieu. En effet, la ruralité et son identité est une thématique actuelle en Suisse. La ruralité représente une grande partie du territoire donc les questions que je me pose à Conthey peuvent s’appliquer à d’autres régions. Bien construire l’urbanisme et l’architecture de la ruralité sont des enjeux majeurs dans le développement du pays.

Site du projet
Pour ce projet, j’ai décidé de me focaliser sur le village de Premploz. Celui-ci propose plusieurs opportunités favorables à sa revitalisation. Les fontaines sont des éléments identitaires forts que je souhaite conserver et valoriser. Les poches végétales présentes entre le vieux village et la zone villa présentent un potentiel de réintégration des vergers. Les granges inutilisées à caractère rural sont une opportunité de densification au cœur du vieux village. Enfin, la dernière opportunité, le parking qui a été construit dans les années 90 en détruisant des anciennes bâtisses représente une grande surface vide au centre du village et permet la mise en place de nouvelles constructions.

Recherche de dispositifs spatiaux propre au lieu
En déambulant dans le village, j’ai remarqué la présence de nombreux recoins situés entre les maisons. Ces espaces extérieurs privés servants principalement à la distribution des logements ont attirés mon attention. Je les ai nommés, les interstices. Ces espaces animent la rue en créant des poches habitées composées de terrasses, d’escaliers ou de balcons. Je me suis également souvenu du jardin potager de mon arrière-grand-mère. Il est contenu entre plusieurs habitations qui ont des percées visuelles sur ce jardin. Pour finir, lors de cette déambulation, j’ai remarqué la présence de nombreux seuils d’entrée différents. La pente force la présence de ces marches devant les maisons et ce sont des éléments physiques qui créent une distinction entre le public et le privé. Des balcons sont souvent présents au-dessus des entrées et créent un abri avant d’entrer dans les maisons. Ces différents dispositifs seront repris dans le projet de master.
Lutter contre la perte d’identité
L’implantation du projet peut être résumée en quatre dispositifs distincts qui répondent à la problématique. La rue villageoise réapparaît avec la présence des nouvelles habitations et crée cette continuité visuelle typique de la ruralité. Une place est créée autour d’une fontaine existante et la met en valeur. Cette place est entourée d’un programme public utile aux habitants. Une épicerie et un café-restaurant s’installent dans des granges rénovées. Les interstices, côté rue, servent aux nouveaux habitants. Ce sont des espaces de distribution extérieur et des lieux de rencontre. Ces interstices sont végétalisés en pleine terre. Les jardins à l’opposé de la rue proposent une atmosphère plus calme et sont agrémentés d’arbres fruitiers. La mise en place d’espaces de qualité en s’inspirant de l’existant me permet de répondre à la première partie ma problématique.

Mixité typologique, programmatique et générationnelle
Les nouvelles habitations sont composées de deux à quatre niveaux. Les rez-de-chaussée sont essentiellement composés de logements pour personnes âgées. C’est un élément du programme qui me tient à cœur car j’entends depuis toujours mes grands-parents me dirent qu’ils ne souhaitent pas passer leurs derniers jours dans un EMS en plaine. Ces logements prennent la forme de studios indépendants reliés par des circulations de dimensions généreuses qui se dilatent pour créer des espaces communs. Les étages supérieurs sont réservés aux appartements familiaux de 3 ou 4 pièces. L’entrée dans ces logements se fait par des loggias accessibles depuis les interstices. Ces logements proposent quatre orientations différentes et une pièce de vie en baïonnette. Au total, le projet ajoute 17 studios pour personnes âgées, 14 appartements 3 pièces, 12 appartements 4 pièces, une salle commune, une cave à vin, une buanderie, un café-restaurant et une épicerie. Les logements sont répartis de cette manière : 60% sont dans la partie neuve et 40% sont dans les granges rénovées.

Une matérialité qui s’oriente vers une simplicité architecturale, vers une banalité
La coupe et le plan au 1/50 mettent en exergue un bâtiment existant rénové et le nouveau projet. Les interstices prennent vie dans le plan et dans la coupe, on comprend que ce sont des espaces communs importants au projet, végétation, distribution, abritation. Ces interstices sont revêtus de pavés au niveau du sol et les murs extérieurs des bâtiments sont en crépis brut. Ces matériaux minéraux sont contrastés par les brises vues, les volets et les escaliers en bois. La bâtisse rénovée à l’ouest est composée d’une salle de repas en double hauteur et de deux logements pour personnes âgées. On peut imaginer que cette salle peut également être utilisée par les autres habitants du projet. Toutes les entrées du projet sont protégées des intempéries, soit par un avant-toit ou par les circulations. L’entrée dans les appartements se fait par la loggia qui amène l’habitant à un vestibule d’entrée composé d’une armoire. Cette armoire encastrée fait partie d’une grande paroi qui court sur la longueur de l’appartement sous le fait. Cette paroi sert à desservir les chambres et contient également le mobilier de la cuisine. Faite de bois, elle vient apporter de la chaleur et contraste avec les murs intérieurs qui sont le reflet de l’extérieur, crépi brut. Ce jeu entre bois et matière brut se retrouve également dans les chambres et le salon. Les embrasures des fenêtres sont habillées de bois et intègrent un bureau (chambre) ou une assise (salon). Ce jeu de matière est également perceptible au sol. En effet, une alternance entre revêtement minéral et parquet est faite entre la loggia et l’entrée, l’entrée et la salle de bain ou la salle à manger et la cuisine.
La coupe/façade au 1/20 continue à parler de cette dualité entre le bois et la minéralité. On remarque la présence du mobilier intégré aux fenêtres dans la coupe. Les murs en brique monolithique isolante nous parlent de cette banalité retrouvée. En effet, un mur simple mono-matériaux me rappelle les anciennes constructions en pierres sèches. Ces briques sont posées sur un socle en béton présent pour maitriser la pente. Ce socle est marqué par une surépaisseur et un crépi plus grossier que la partie supérieure. On notera la présence d’un volet dans la chambre servant de brise vue et de pare-soleil. Ce volet est construit avec les mêmes sections de bois que les gardes corps et les brises vues des loggias pour une facilité de montage et une simplicité des matériaux. La toiture est faite de tuile en terre cuite, comme on en retrouve dans le village. Les avants toits se prolongent en finesse pour protéger les façades.

Site
Genève
Semestre
2023 Printemps
Module
JMA-GE TRAVAIL DE MASTER SP 2023
Intervenant-e-s
  • Mathias Evequoz - Étudiant
  • Alicia Escolar Rinquet - Professeur
  • Nicolas De Courten - Expert